… se demande un certain nombre d’entre vous (1).
Aujourd’hui je voulais donc vous servir une pinte de son avec des zestes d’images et quelques bouts de phrases dedans, mais ce faisant les mots de Michel me reviennent en tête : « Dis donc c’est pas pour les vieux ton truc là, je comprends pas tout ».
Michel est l’une des personnes les plus érudites que je connaisse. De la gastronomie à l’histoire, la biologie, la géo du 9-3 et du monde entier, des choses les plus triviales aux plus élitistes, il construit des autoroutes pour l’esprit et fait des ponts entre elles comme un gamin avec sa boîte de legos. Un domaine qu’il connaît pour l’avoir pratiqué sans y prêter attention, c’est la « culture populaire ».
Cette expression est censée prouver aux abrutis que des cultures existent là où il n’y a pas la Culture avec un grand C. Autant dire d’emblée que je fais partie de ceux qui n’aiment pas l’idée : la Culture n’existe pas. Et ça n’empêche pas de bidouiller des trucs avec des gens, abrutis ou non et d’apprendre d’eux.
Si de pauvres bouseux du 18è siècle avaient eu le temps d’aimer le clavecin, d’apprendre à en jouer et le fric pour se l’acheter, ils l’auraient fait non ? Enfin encore eut-il fallu que le clavecin ne représentât pas pour eux l’aristocratie en culotte de satin.
Or quel est le point commun entre un aristo en culotte de satin, un bouseux en guenille et un bohémien-guitariste en chemise de bûcheron ? Ils portent leur culture sur eux.
Bref, tout ça pour dire, Michel si tu nous lis : oui, nous avons choisi de porter notre culture en bandoulière. La différence avec l’aristo en culotte de satin c’est qu’on voudrait la partager, aussi utopique que cela paraisse. Car comme toute culture elle a ses codes, ses références, et certes, celles-ci sont tout aussi liées à une époque que l’histoire des jardins ouvriers de l’Ile de France (par exemple).
Oui mais… où qu’elle est la pop culture ?
Sur ce qu’est la « pop culture », les savants ne sont pas d’accord et on s’en fiche un peu. Il semble qu’à la base des sociologues anglo-saxons ont voulu opposer l’élitisme de la fameuse Culture à la « culture de masse ». Il est question d’art de masse, reproduit en masse, « consommé » et d’art tout court.
Peu importe, quand je vois les dessins et les affiches de concert de Rick Froberg, je reconnais instantanément cette pop culture que j’aime. C’est celle des bandes dessinées américaines et japonaises, mêlant un univers enfantin, onirique à une violence parfois morbide et une énergie irrésistible.
Elle ne me parle pas seulement parce que j’en reconnais les références, mais par ce qu’elle dégage, qui correspond à l’esprit de ma génération, celle du « post-punk ». Et ce n’est pas un hasard si je prends Rick en exemple, puisque cet illustrateur génial est aussi le leader d’un groupe que certains cointeurs n’hésitent pas à nommer meilleur groupe de rock du monde : les Hot Snakes.
Automatic Midnight – Hot Snakes 1999
(1) Petite précision sur ce « certain nombre » qui se demande où qu’elle est la pop culture : il est approximativement 100 fois inférieur au nombre certain qui se demande quand c’est qu’on boit un coup. Question à laquelle nous consacrons environ 200 fois plus d’énergie croyez-le bien.